La Médecine s’intéresse au jeûne
L’autophagie, un nettoyage cellulaire pour vieillir en bonne santé
L’autophagie est un processus biologique fondamental par lequel les cellules éliminent leurs déchets et recyclent leurs composants endommagés. Essentiel pour le maintien de la santé cellulaire, ce mécanisme perd de son efficacité avec l’âge, contribuant à l’apparition de nombreuses maladies chroniques, notamment les cancers, les maladies métaboliques, immunitaires et neurodégénératives comme Alzheimer ou Parkinson. Une équipe de l’Institut Pasteur a récemment approfondi la compréhension de ce phénomène et a identifié des moyens de le stimuler, ouvrant la voie à des traitements potentiels contre ces pathologies.
Qu’est-ce que l’autophagie ?
L’autophagie est un système de recyclage interne des cellules. Elle permet d’éliminer des composants indésirables, comme des organelles défectueuses ou des agrégats de protéines. Les déchets sont encapsulés dans des structures membranaires appelées autophagosomes, surnommées « sacs poubelles cellulaires ». Ces sacs fusionnent ensuite avec des lysosomes, des organites responsables de leur dégradation et de leur transformation en éléments réutilisables.
La protéine TECPR1, un composant lysosomal, est cruciale pour la dernière étape de ce processus, car elle coordonne la fusion des autophagosomes avec les lysosomes. Cependant, ce mécanisme peut se détériorer avec l’âge, ce qui entraîne une accumulation de déchets cellulaires et contribue au développement de maladies.
Jeûne intermittent et stimulation de l’autophagie
Le jeûne intermittent, caractérisé par des périodes de privation alimentaire de 12 à 16 heures, stimule l’autophagie. Des études montrent que cette pratique réduit les risques de maladies cardiovasculaires, de cancers et de troubles métaboliques tout en favorisant la longévité. En réponse à l’absence prolongée de nutriments, les cellules intensifient l’autophagie pour recycler leurs ressources internes et maintenir leur fonctionnement.
Les chercheurs de l’Institut Pasteur ont reproduit en laboratoire ce mécanisme. Ils ont étudié la formation des autophagosomes à l’aide de deux approches : la première consistait à recréer ces structures in vitro à partir de composants purifiés, et la seconde combinait biologie cellulaire, biochimie et analyse structurale dans des cultures cellulaires. Ils ont découvert que les cellules affamées produisent un échafaudage protéique permettant de stabiliser les membranes des autophagosomes, qui prennent la forme d’un bol pour collecter les déchets.
Rôle clé de l’autophagie dans les maladies neurodégénératives
L’autophagie joue un rôle essentiel dans la protection des neurones contre les agrégats de protéines toxiques, observés dans des maladies comme Alzheimer ou Parkinson. Ces agrégats, formés par des protéines comme l’alpha-synucléine ou Tau, perturbent les fonctions neuronales et entraînent la mort des cellules.
Les chercheurs ont identifié une voie spécialisée de l’autophagie, appelée « aggréphagie », qui cible spécifiquement ces amas protéiques. Ils ont montré que les autophagosomes transportant ces agrégats sont marqués par une petite protéine, LC3C, qui leur donne une identité unique. Cette identité permet leur interaction avec TECPR1, qui guide les agrégats vers les lysosomes pour leur élimination.
Les expériences ont démontré que restaurer les niveaux de TECPR1 dans les cellules neurales pouvait réactiver l’autophagie, améliorer l’élimination des agrégats toxiques et protéger les neurones de la cytotoxicité et de la mort cellulaire.
Vers de nouveaux traitements
Ces découvertes ouvrent des perspectives prometteuses. Les chercheurs envisagent de développer des médicaments capables d’activer l’autophagie en stimulant la formation des autophagosomes. De tels traitements pourraient un jour cibler les maladies neurodégénératives, mais également d’autres pathologies liées à l’âge, en rétablissant la capacité des cellules à se nettoyer et à fonctionner de manière optimale.
Le jeûne intermittent, en tant que pratique accessible et naturelle, pourrait également jouer un rôle préventif dans l’entretien du processus d’autophagie. Cependant, pour obtenir des effets durables, il nécessiterait une adoption régulière et prolongée, comme le régime 16/8 (16 heures de jeûne et 8 heures de prise alimentaire).
Conclusion
L’autophagie représente un mécanisme clé du maintien de la santé cellulaire et de la prévention du vieillissement. Bien que son dysfonctionnement contribue à des maladies graves, les avancées scientifiques permettent d’envisager de nouvelles solutions thérapeutiques. Ces travaux, en reliant biologie fondamentale et applications pratiques, offrent un espoir tangible pour lutter contre les pathologies liées à l’âge et prolonger la durée de vie en bonne santé.
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References
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[2] Wetzel, L., Blanchard, S., Rama, S. et al. TECPR1 promotes aggrephagy by direct recruitment of LC3C autophagosomes to lysosomes. Nat Commun 11, 2993 (2020). https://doi.org/10.1038/s41467-020-16689-5
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